04 février 2018

Emile Marie Hilarion BULOZ
ou les déboires tragiques d'un préfet de province...


Photographie originale daté 1921 du Préfet Emile BULOZ;  Elle porte une dédicace autographe adressée un an avant sa mort, à M.Edmond QUINTARD Conseiller Général de la Vienne.
Collection Jérôme Cornieux.

Dernière acquisition photographique en date, ce très beau cliché original de 1921 du Préfet Emile BULOZ est à l'origine de ce nouvel article.

Emile BULOZ est né à Toulon dans le Var le 19 octobre 1866. Son père Eugène, est capitaine au 29eme régiment d'artillerie quand il meurt à 46 ans....
Seul avec sa mère, Emile suit des études studieuses et obtient un baccalauréat ès sciences puis en droit. Soutient de famille il est exempté de service militaire.

Le 24 juin 1885, il commence sa carrière professionnelle comme commis auxiliaire des chemin de fer du P.L.M à Aix.

En janvier 1892, il devient Chef de Cabinet du Préfet des Basses-Alpes.
Il attaché en 1893 au cabinet du Président du Conseil du Ministre de l'Intérieur Alexandre RIBOT.

Photographie originale d'Emile BULOZ, prise à Paris en 1893. La curieuse dédicace (quand on connait la fin tragique du Prefet BULOZ) est très certainement postérieure et est adressée à son frère Philippe... 
Collection J.CORNIEUX

En 1896, il entre dans le Corps Préfectoral comme Sous-préfet d'Embrun dans les Hautes-Alpes.
Il va exercer comme Sous-préfet à Avallon dans l'Yonne, Châteaudun dans l'Eure -et-Loire.
En 1899, il part en Roumanie dans le cadre d'une Mission pour le Ministère des Affaires Etrangères.
Il revient en 1913, comme Sous-préfet de Cholet dans le Maine-et-Loire;
Quand la Grande Guerre éclate il est Sous-préfet de Vendôme dans le Loir-et-Cher et en 1918, il sera nommé à Boulogne -sur-Mer.

En 1920, ses services sont récompensés par le Ministère de l'Intérieur. Il est nommé Préfet du département des Deux-Sèvres, puis de la Vienne en 1922.


Pour ses actions menées au cours de la guerre dans le Pas-de-Calais, le Préfet BULOZ (Alors Sous-préfet de Boulogne/Mer) recevra la Croix de Guerre 14-18 ainsi il sera cité à l'ordre de la Nation le 4 octobre 1918, sera fait Chevalier de l'Ordre de l'Empire Britannique par sa Majesté le Roi d’Angleterre lors de sa venue à Boulogne/Mer en 1919 et Chevalier de l'ordre de la Couronne de Belgique. 






On distingue sur sa poitrine les décorations suivantes: Chevalier de la Légion d'Honneur obtenue le 25 juillet 1919, Croix de Guerre 14-18, Chevalier de l'Ordre de l'Empire Britannique, Chevalier de l'Ordre de la Couronne de Belgique, Officier d'Académie, Officier du Mérite Agricole et en partie cachée, Médaille d'Or des Secours Mutuels.
En dessous, il porte la plaque de Grand Croix de l'Ordre Tunisien du Nichan Iftikar au chiffre du Pacha Ali Bey 1882-1902.


La belle carrière d 'Emile BULOZ est donc une des plus prometteuse parmi celles de ces homologues préfets de l'époque...

Mais voilà qu'en juillet 1924, une affaire des plus étonnante rattrape notre préfet...Un abus de confiance! L'affaire fait grand bruit à l'époque et la presse parisienne ne manque pas cette occasion pour faire la une.












On reproche au Préfet BULOZ, d'avoir "emprunté" en 1918 un registre municipal très ancien de la commune de Villedieu-en-Beauce petite bourgade du Loir-et-Cher.
L'emprunt est modeste semble t'il.....oui mais dans ce rare registre d'époque est mentionné l'acte de baptême de RONSARD et d'autres célébrités locales!
On apprend aussi après enquête des agents de l'inspection du Ministère de l’Intérieur, que le Préfet est aussi grand amateur de brocantes et aurait pris le temps au cours de ses diverses mutations, de se servir allègrement dans les greniers et caves des sous-préfectures et préfectures, emportant avec lui nombres d'objets appartenant à l'Etat!

Voilà notre préfet en bien fâcheuse posture.....Il demande d'être démis de ses fonctions pour mieux pouvoir se défendre. Le Ministre Camille Chautemps accède immédiatement à sa demande, et la presse se déchaîne...








Timidement, le Préfet BULOZ avoue les faits à demi-mots et que le registre lui a bien été remis mais qu'il l'a perdu depuis longtemps au cours d'un de ses nombreux déménagements...ce qui ne plaide pas en sa faveur.

Les mois s'écoulent et le 7 octobre 1924, coups de tonnerre dans ce qui est devenue "l'affaire BULOZ"......On retrouve le Préfet BULOZ mort  dans une chambre de l'Hôtel d'Orsay à Paris!

Tout de suite cette mort pose question et l'on s'interroge sur ses circonstances, surtout que le procès devait se faire ce même mois d'octobre!
 les enquêteurs de la police parisienne immédiatement dépêchés sur place ordonnent une autopsie du cadavre.




Les résultats rapides indique une mort naturelle suite à une hémorragie cérébrale, malgré un sachet de substances médicamenteuses retrouvé à coté de sa dépouille...

Toutes les affaires du préfet avaient été saisies, on retrouvera dans une malle le fameux livre qui avait tant fait parler de lui et mis à mal le Préfet BULOZ....Enveloppé dans un papier, il portait une inscription " à ouvrir en cas de mort....pour ma justification et ma bonne foi"